JULES GOUX

"Le glorieux charlatan" 1885-1965

A 18 ans, après des études techniques, Jules suit la trace de son père dans les bureaux d’études des cycles Peugeot. Il débute en compétition en 1906 sur voiturette Lion-Peugeot, en remportant la course de côte du Ballon d’Alsace.

C’est le début d’une carrière hors-normes chez Peugeot et de succès exceptionnels en course. Son palmarès, de 1906 à 1927, comprend 47 participations à des compétitions de premier plan, dont 27 victoires, et des records mondiaux.

En 1921, il change de constructeur pour Ballot et en 1925, pour Bugatti.

C’est ensuite au développement de l’automobile qu’il se consacre, en travaillant sur les lubrifiants et les carburants.

1909

Les visages de Goux et du mécanicien Duvernoy sont marqués par la fatigue. Le concessionnaire Peugeot à Madrid, juché à l’arrière, ne cache pas sa joie. On remarque la bande toilée gainant le volant et les pneus « à rivets ». Jules Goux venait de gagner la coupe de Catalogne, prés de Barcelone, 364 km à la moyenne de 57,600 km/h.
Voiturette Lion-Peugeot n°3, moteur bicylindre en V de 1930 cm3 (ingénieur Michaux). 20 mai 1909.

1911

En 1911, Jules Goux obtient son brevet de pilote d’avion. Le voici aux commandes d’un

avion monoplan Rossel-Peugeot (moteur Gnôme 50 HP, hélice Reggy, surface 20 m², poids 350 kg. Pendant la Grande Guerre, il servira dans l’aviation comme observateur.

1911-1912

Grand Prix de Boulogne 1911. Jules Goux sur Peugeot. Notons les pneus à rivets très visibles sur cette photo.

Course de côte du Mont Ventoux, le 6 août 1911. La pente moyenne est de 10%, et de 13% les trois derniers kilomètres. En 2ème catégorie, Jules Goux est vainqueur à la moyenne de 56,500 km/h.

 

La hauteur inhabituelle du capot s’explique par la formule du moteur, devant respecter une sévère limitation de l’alésage, compensée par une course monstrueuse : bicylindre en V de 80 x 280 mm, soit une cylindrée de 2 813 cm3. On remarque aussi la transmission par chaîne, de mise à cette époque. Mais ces formules, ainsi que les très grosses cylindrées sont déjà démodées, et les américains ont fait évoluer leurs bolides. Les européens doivent réagir.

Une nouvelle aventure commence pour Peugeot, Jules Goux et les « charlatans »…

Grand Prix ACF de Dieppe 1912. 

Grand Prix du Mans 1912. (ce ne sont pas encore les 24 heures qui débuteront en 1923)

1913

LES RECORDS DE 1913, par Jules Goux et Georges Boillot.

 

LES RECORDS DE 1913, par Jules Goux et Georges Boillot.

La L76 de Dieppe 1912 est transformée, allégée, et aménagée en monoplace type « torpille » pour battre plusieurs records les 10 mars et 12 avril 1913, à Brooklands (G-B), dont le record de l’heure (à 170,588 km/h) et le record universel de Vedrines sur monoplan Deperdussin qui était de 167,800 km/h. Les avions sont battus par les automobiles.

Le demi-mile lancé, l’heure, les 50 miles, les 100 miles,

les 150 miles, à plus de 170 km/h.

1913

Grand Prix ACF 1913 Amiens.

Grand Prix de Boulogne sur mer 1913.

INDIANAPOLIS 1913

27 voitures au départ, 10 à l’arrivée

Le 30 mai 1913, c’est l’apothéose pour Jules Goux, vainqueur du Grand Prix d’Amérique.Il a parcouru les 200 tours de l’autodrome (soit 500 miles ou 804,500 km) à la moyenne de122,155 km/h, en 6 h 35 m 05 s. La Peugeot L76 (pour une cylindrée de 7,600 L, ramenée réglementairement à 7,4 L) a fait merveille. Cette victoire sur les « Grandes Sportives» américaines (la Mercer devancée de 13 minutes et la Stutz arrivée en feu !) aura un retentissement mondial. Après évolution en 3 L (fin 1913), ce moteur sera le plus copié de tous temps.

1913-1914

De nouvelles voitures sont construites en 1913, et la gamme s’élargit, souvent suite à des limitations réglementaires. La Peugeot EX 3 est conçue par les « charlatans » : moteur de 5 655 cm3 (100 x 180) 115 ch, 2 ACT commandés par cascade de pignons, nouveau châssis.

Lors des essais, Zucarelli trouvera la mort sur sa route.  Au GP ACF d’Amiens, Boillot sera vainqueur de l’épreuve, suivi de Goux, tous deux sur EX 3.

A Indianapolis en mai 1914, Georges Boillot, assisté de J. Goux, présente son EX3 n°7, dont le châssis cédera au 360ème mile suite crevaison. Goux fera quatrième sur l’EX3 n°6.

1918

Le garage de Jules GOUX, situé à Besançon.

1919

INDIANAPOLIS, 31 mai 1919

33 voitures partantes dont 9 françaises, 11 à l’arrivée, 3 accidents mortels

Les compétitions reprennent après la guerre. Georges Boillot, pilote de chasse, a été descendu en 1916. Son frère Paul est mort au combat. Le plus jeune, André, démobilisé de l’aviation, reprend le flambeau chez Peugeot. Pour Indianapolis 1919, Jules Goux s’engage à titre personnel sur une EX5 4,5 L de 1914 (ACF Lyon) appartenant à un amateur américain. Il termine troisième. Le vainqueur est Wilcox, sur une voiture identique. La Peugeot L25 d’usine (2,5 L, 80 ch, préparée en 1914), pilotée par André Boillot, casse une roue dix tours avant l’arrivée.

1920

En 1920, E. Henry est parti chez Ballot. L’ingénieur Grémillon le remplace et crée un moteur de 3 litres
 4 cyl.(80 x 140) complexe, fragile et manquant de puissance (80 à105 ch), 3 ACT, 20 soupapes,
 8 bougies, monté sur châssis type L3 de 1913.  Trois voitures sont au départ d’Indianapolis fin mai, pilotées par J. Goux,  A. Boillot et H. Wilcox.  Aucune ne franchira la ligne d’arrivée. Sans doute déçu, Jules suivra Henry chez Ballot.

 

Avant la course, le boxeur George Carpentier encourage Jules Goux au volant de sa L3 Grémillon n°16. On remarque la position oblique du mécanicien, cramponné à la poignée prévue pour sa main droite.

1921-1924

De 1921 à 1924, Jules Goux continue sur sa lancée, sur voitures Ballot :

1921- GP de l’ACF, Le Mans, sur voiture de 2 litres (les autres sont des 3 litres) – 3ème

Meeting de Boulogne s/mer, sur une 5 litres – 1er (et record de l’épreuve)

Meeting de Calais – 1er au général (coupe des As -1er, course de côte du Cran-1er)

GP d’Italie à Brescia, 500 km, sur 3 litres – 1er (record mondial de moyenne sur route en circuit fermé 144,729 km/h)

Course de côte de Gaillon, sur 3 litres – 1er

Coupe Florio (Sicile), 540 km – 1er

1922 – GP d’Amérique, Indianapolis, sur 3 l – abandon au 5ème tour (arbre de roue cassé)

Targa Florio (Sicile) 432 km, sur 2 litres – 2ème (derrière une Mercedes de 4,5 litres)

1924 – GP d’Europe à Lyon

1926

En 1926, sous les couleurs de BUGATTI.

Targa Florio (Sicile) – 3ème

GP ACF à Miramas, 500 km – 1er

GP d’Europe à St Sébastien, 500 km – 1er

GP d’Espagne à St Sébastien, 500 km – 2ème

GP de Milan à Monza – 2ème

Après une dernière course à Montlhéry

en 1927, Jules Goux se retire de la course.

1948

1948, Jules Goux raconte ses débuts, et les progrès de l’automobile issus de la compétition. 

« En sortant du collège de Châlon sur Marne, section des Arts et Métiers, j’étais entré chez Peugeot comme dessinateur aux appointements de 15 francs par mois, ce qui d’ailleurs était magnifique !

Les voiturettes étaient construites par l’usine de cycles Peugeot à Beaulieu, tandis que les grosses voitures sortaient des ateliers d’Audincourt. C’est en 1906, donc, que je fis ma première course en me lançant dans la rude montée du Ballon d’Alsace où se disputait la coupe Lederlin. Je gagnais ma catégorie et fus premier aussi au classement général. De cette date jusqu’en 1911 y compris, j’ai participé sur des voiturettes Lion-Peugeot mises au point par mes soins, à toutes les course réservées à cette catégorie, dont beaucoup d’ailleurs furent orgnisées par le journal l’Auto, plus particulièrement en 1909/1910/1911. Le premier Grand Prix de l’ACF était revenu à Sziz sur Renault.

En 1907, c’était Nazzaro sur Fiat qui gagnait et en 1908 Lautensclager sur Mercedes était le premier. De 1908 à 1911, l’épreuve fut interrompue faute de concurrents nationaux, et ne fut reprise seulement qu’en 1912, année où mon regretté camarade Georges Boillot remporta la victoire sur Peugeot, la renouvelant en 1913 alors que je me classais second derrière lui, pilotant une Peugeot également. Ce fut ma première épreuve sur grosse voiture. Nous avions 7.6 litres de cylindrée en 4 cylindres. Fiat avait 14 litres de cylindrée en 4 cylindres et tous les concurrents faisaient sensiblement la même vitesse maxima, laquelle oscillait entre 160 et 165 km/heure. Je rappelle que c’était en 1913. Pour en revenir aux voiturettes, je préciserai qu’à cette même époque, le règlement limitait l’alésage. En conséquence, pour augmenter la puissance il fallait augmenter la course.(…) J’ai courru en 1910 avec une 2 cylindres en V de 80 par 280. Le moteur dépassait ma tête de beaucoup et je devais scruter ma route par le côté, ne pouvant le faire par-dessus le capot. En outre, la voiture qui était à voies étroites, se renversait nettement sur deux roues dans les virages. (…) Pendant la guerre, les Peugeot de 1914 triomphent en Amérique et en 1919 à Indianapolis c’est encore la même Peugeot qui enlève la première et la troisième place.

De tels résultats n’ont pu être atteints et une telle puissance obtenue et utilisée effectivement, que grâce aux améliorations apportées à la tenue de route, à l’adhérence et à la stabilité des voitures, par des études appropriées de la suspension, abaissement du centre de la gravité, roues indépendantes, répartition rationnelle du poids. L’application des roues indépendantes à la course a été leur consécration. La course a guidé le progrès !

On ne le répétera jamais assez, depuis 54 années la course a toujours ouvert la voie au progrès, tant pour les moteurs que pour les voitures. Les moteurs d’aviation eux-mêmes sont dérivés du perfectionnement des moteurs de courses automobile dès leurs débuts. »


Jules Goux.

1965-2013

 Jules Goux s’était retiré dans le village de Mirmande (dont Haroun Tazieff fût maire de 1979 à 1989), ou il repose paisiblement depuis 1965. Depuis 2013, une rue  porte son nom sous l’initiative et l’action de ma famille, la “montée Jules Goux” est une jolie voie qui serpente au milieu de la nature et permetant l’accès au village.